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mercredi 24 novembre 2010

Pologne - Côte d'Ivoire : quels enseignements


La Pologne a mis un terme à la série de victoires (quatre) du nouveau sélectionneur ivoirien, François Zahui. Outre le symbole de la première défaite, ce match amical a mis en exergue des lacunes bien connues des observateurs du football ivoirien.


Absence de coordination entre les blocs

L'éternel défaut de l'actuelle sélection ivoirienne (la sélection "académicienne" ou "quasi-académicienne") réside dans le manque de liant entre les lignes, en particulier la ligne défensive et celle des milieux. Le repositionnement de Zokora en défense centrale n'a pas arrangé les choses, car il était plus disposé (et peut être en réalité plus à même) à remplir cette fonction que Yaya. Le fait est que le nouveau sociétaire de City rechigne à redescendre chercher les ballons et on a tendance à revoir les fameux ballons aériens directement destinés aux ailiers et aux attaquants.


Les errements défensifs

Autre marque de fabrique de la sélection des années 2000, sa fébrilité défensive. Ericksson avait pensé la stabiliser en demandant à Zokora de retrouver son poste de formation en défense centrale. L'association à Kolo au Mondial avait été relativement probante mais la solidité défensive face au Portugal avait surtout été le fait d'un milieu de terrain extrêmement discipliné, laissant à l'adversaire ni espace, ni même l'opportunité de porter le ballon et parfois même de se retourner. Les Portugais avaient été muselés, non pas par les défenseurs, mais dans l'entre-jeu même. Cette rigueur, partie en fumée dès la fin du Mondial (voire dès la seconde période du match face au Brésil), la défense paraît à nouveau très friable. Zokora, malgré tous ses efforts, peine à coordonner ses hommes et se trouve être "à la ramasse" sur deux des trois buts polonais (étrangement semblables d'ailleurs). Kolo avaient rencontré les mêmes difficultés lors de Ghana 2008 et dans les matchs qui avaient suivi. Stabiliser la charnière Zokora-Kolo à toutes les chances de renforcer la défense centrale ivoirienne. Encore faut-il maintenir ce duo sur plus de trois matchs consécutifs pour lui permettre de se rôder...


Sélection nationale cherche gardien de but de niveau international

Tout comme la défense, le poste de gardien est en Côte d'Ivoire un problème séculaire. On en vient à regretter l'époque de Losséni Konaté où le sélectionneur n'avait pas à choisir entre plusieurs gardiens de niveau moyen puisqu'il n'y avait qu'un seul gardien de niveau de moyen, les autres n'ayant pas le niveau du tout. Aujourd'hui Yebouah (face à l'Italie) et Zogbo (face à l'Allemagne) ont tous deux montré qu'ils pouvaient faire concurrence à Barry qui, s'il a considérablement progressé (notamment dans son placement et dans la communication avec sa défense), reste un gardien médiocre. Des rumeurs (non-vérifiées) évoquent des tests en France pour Vincent Angban, fraîchement libéré par l'ASEC. Une éventuelle arrivée dans une petite écurie de Ligue 2 (il n'a clairement pas le niveau de la L1 française) pourrait changer la donne en sélection dans les mois à venir. En attendant la Côte d'Ivoire cherche un gardien international. Mais, est-ce vraiment une nouveauté ?


L'éternel rengaine des "choix douteux"

Tout sélectionneur est critiqué pour ses choix de composition d'équipe ou les remplacements qu'il effectue en cours de match. Robert Nouzaret avait été relativement épargné, certainement parce qu'il avait fait venir (ou revenir) des "Européens" débordant de motivation chez les Eléphants (Dié, Akalé, Drogba, Dagui Bakari notamment). Henri Michel, lui, avaient défrayé la chronique par des choix qui aujourd'hui encore demeurent difficilement excusables (voir les titularisations de Cyrille Domoraud lors des éliminatoires CAN/Mondial ; ou encore la sortie de Baky à la 62e minute face aux Pays-Bas en 2006, tandis qu'Arouna Koné ne quittait le pré qu'à la 72e...). Même Ericksson n'a pas manqué à la tradition en laissant Gervinho sur le banc pour le début du match contre la Seleçao.

Il est donc logique et dans la continuité que certains choix de Zahui nous apparaissent comme critiquables. Hors le cas des gardiens discuté plus haut, la titularisation de Boka laisse dubitatif. Celui que l'on surnomma le Roberto Carlos ivoirien (ou "Bokarlos") a toujours cette fâcheuse tendance à la passivité tant que le danger n'arrive pas par son couloir. Il est autant responsable que la charnière sur le 1er et le 3e but polonais. On sait que Tiéné a montré le même type de lacune (notamment face au Brésil) mais il semble tout de même qu'il soit plus "sûr" que le joueur de Stuttgart à ce poste.

Enfin, la titularisation de Kader Keita appelle également un commentaire. Parti au Qatar à la fin du Mondial, le joueur a retrouvé sa place en sélection comme s'il évoluait toujours au haut niveau. Son apport au jeu des Eléphants est toujours aussi inégal, mais plus proche du négatif que du positif. Sa capacité à éliminer un, deux voire trois adversaires ne sera utile aux Eléphants que lorsqu'il dribblera plus vite que l'on ne délivre une passe : autant dire jamais. Les gris-gris de "Popito" ralentissent le jeu ivoirien et son manque d'efficacité n'en font qu'un éternel Joker (et clown ?). Ses deux compatriotes internationaux, Baky (il avait a priori annoncé sa retraite internationale) et Dindane, qui ont eux aussi pris le chemin du Qatar, ont peu de chance de rejouer chez les Eléphants. Il serait sage pour le devenir du collectif ivoirien que Kader connaisse le même sort.


Un maître-mot : stabilité

Il ressort de cette évaluation que seule la stabilité (au niveau de la composition d'équipe comme au niveau de l'encadrement technique) permettra à la sélection "académicienne" de remporter un trophée digne de son talent (au minimum une CAN). Le problème est que le temps file et que plusieurs joueurs formant le noyau dur ne sont plus aussi jeunes et fringants qu'à la CAN 2006. Ceux-là ont peu de chances d'être alignés au Mondial 2014 (Zokora, Kolo, Drogba auront du mal à se maintenir au top, tandis que Baky, Dindane, Keita semblent déjà hors du coup). Il est urgent de laisser un entraîneur travailler sur le long-terme (4 ans au minimum) et veiller à ce que lui-même fasse prévaloir la stabilité de son ossature. Enfin, les progrès réalisés sous Ericksson (au niveau placement et marquage) et la rigueur qu'il a apporté à l'équipe doivent être repris et pérennisés.

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